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Research

Prévalence du burn out chez les sages-femmes du grand Tunis

Prévalence du burn out chez les sages-femmes du grand Tunis

Prevalence of burnout among midwives in greater Tunis

Chawki Mrazguia1, Hassine Abouda1, Haithem Aloui1,&, Ahmed Halouani1, Abir Karoui1, Sawsen Hammami2, Wided Homri1, Mohamed Badis Channoufi1

 

1Faculté de Médecine de Tunis, Tunis, Tunisie, 2Ecole de Santé de Tunis, Tunis, Tunisie

 

 

&Auteur correspondant
Haithem Aloui, Faculté de Médecine de Tunis, Tunis, Tunisie, Ecole de Santé de Tunis, Tunis, Tunisie

 

 

Résumé

Introduction: le burn out est considéré comme un processus qui se développe dans le temps, débute avec l´épuisement émotionnel et se continue avec la dépersonnalisation et la diminution de la réalisation.

 

Méthodes: il s´agit d´une étude quantitative, transversale, descriptive et analytique réalisée à partir d´une enquête menée auprès des sages-femmes. L´enquête a duré 1 mois (15 juillet 2019 à 15 aout 2019). Elle a été menée dans 4 maternités universitaires de grand Tunis. Nous avons utilisé le questionnaire : le Maslach Burn out Inventory (MBI). Notre objectif principal est de déterminer la prévalence des taux de burn out chez une population de sages-femmes exerçant dans des maternités de niveau trois du grand Tunis. L´objectif secondaire est de chercher les facteurs de risques associés au burn out sévère.

 

Résultats: notre étude a été réalisée auprès de 90 sages-femmes. Elle a démontré que le burn out est une situation bien réelle et alarmante. Nous avons constaté que 86,7% des sages-femmes interrogées avaient un burn out. Plus en détails, l´épuisement émotionnel est élevé chez 50% des cas, la dépersonnalisation est élevée chez 47,8% et l´accomplissement personnel est bas chez 14,40% d´entre elles. Les facteurs associés significativement au burn out sévère sont : le célibat, l´ancienneté <20 ans, la surcharge de travail élevée, la distance lointaine entre le domicile et le lieu du travail, le regret du choix du métier, l´insatisfaction des horaires de travail et de l´organisation globale de travail, le mauvais climat professionnel, la présence de stress professionnel, la contraction de maladie professionnelle, les accidents de travail et le développement de conduites addictives.

 

Conclusion: suite à ses résultats alarmantes, il serait urgent de proposer des mesures de prévention, de dépistage et de prise en charge des sages-femmes touchées par ce syndrome ou à risque. Une formation bien approfondît en matière de gestion de stress doit être intégrer dans le cursus universitaire. La prévention et le traitement de l´épuisement professionnel auront certainement un impact important en termes de qualité de vie et par conséquent en termes de qualité des soins fournis.


Introduction: burnout has been defined as a process that develops over time ;it manifests as emotional exhaustion associated with depersonalization and reduced personal accomplishment. Methods: we conducted a quantitative, cross-sectional, descriptive and analytical study based on a survey of a representative sample of midwives. The survey was conducted for one month (15 July 2019 -15 August 2019). It was conducted in 4 University Maternity Hospitals in greater Tunis. We used The Maslach Burn out Inventory (MBI). The purpose of this survey was to determine the prevalence of burnout in a population of midwives working in a level III Maternity Hospital in greater Tunis. The secondary purpose was to identify the risk factors associated with severe burnout. Results: our study was conducted among 90 midwives. It showed that burnout is a real and alarming condition. Eighty-six point seven percent of midwives interviewed had burnout. In more detail, emotional exhaustion was high in 50% of cases, depersonalization was high in 47.8% and personal fulfillment was low in 14.40% of them. Factors significantly associated with severe burnout were: celibacy, <20 years seniority, high work overload, the long distance between home and work, professional regret, dissatisfaction with working schedules and with the overall work organization, a toxic work environment, work stress, occupational disease, work accidents and behavioral addiction. Conclusion: given these alarming results, prevention, screening and management measures for midwives affected by this syndrome or at risk of developing it should be implemented. Well-founded stress management training should be integrated into the university curriculum. The prevention and treatment of burnout will certainly have a significant impact on quality of life and therefore on quality of care.

Key words: burnout, midwives, risk factor

 

 

Introduction    Down

L´épuisement professionnel ou « burn out » est un syndrome qui a été décrit pour la première fois durant les années 70 par le psychanalyste américain Freudenberger [1]. Selon lui, le burn out est un état de fatigue, de dépression et de frustration apporté par la dévotion à une cause, un mode de vie ou à une relation à l´autre qui échoue à produire les récompenses attendues et conduit en fin de compte à la diminution de l´implication et l´accomplissement au travail [1]. Le burn out est considéré comme un processus qui se développe dans le temps. Il débute avec l´épuisement émotionnel. Il continue avec la dépersonnalisation et la diminution de la réalisation [2]. Donc ce syndrome comporte trois dimensions [3]: 1) l´épuisement émotionnel: sentiment de fatigue, d´être vidé physiquement et émotionnellement. Le travailleur perd, par conséquent, toute motivation pour son travail qui devient alors une corvée. La baisse d´efficacité professionnelle secondaire à cet épuisement provoque une accumulation des tensions. 2) La dépersonnalisation: détachement et attitude négative vis-à-vis de son travail. Il traduit une forme de sécheresse relationnelle qui n´est qu´un mécanisme mal adapté de défense psychologique pour faire face à l´épuisement des ressources internes. 3) L´accomplissement personnel: baisse de l´épanouissement professionnel et dépréciation de soi et des compétences. le professionnel croit que ses objectifs ne sont pas atteints, son estime de soi diminue et il en découle un sentiment de culpabilité et de honte qui font baisser ses performances.

Les sages-femmes affrontent quotidiennement des situations difficile et stressantes tel que l´accouchement et la fausse couche, et en contrepartie elles devraient maintenir leur émotions et avoir la capacité de gérer ses différentes événements avec beaucoup de maitrise, de prudence, de responsabilité et avec les moyens disponibles. Ce métier implique un haut niveau d´interaction social, elle doit gérer en permanence des interactions avec sa patiente et la famille de sa patiente, ses collègues, la hiérarchie médicale et l´administration. Ce qui expose à une confrontation régulière avec des situations conflictuelles qui va impacter le bien-être et peut favoriser l´installation de l´épuisement professionnel. Dans notre étude, l´objectif principal est de déterminer la prévalence des taux de burn out chez une population de sages-femmes exerçant dans des maternités de niveau trois du grand Tunis. L´objectif secondaire est de chercher les facteurs de risques associés au burn out sévère.

 

 

Méthodes Up    Down

Type d´étude

Il s´agit d´une étude quantitative transversale descriptive analytique réalisée à partir des données d´une enquête menée auprès des sages-femmes travaillant dans les maternités universitaires de Tunis : centre de maternité et de néonatologie de Tunis (CMNT), maternité de l´hôpital Charle Nicole (HCN), Hôpital Aziza Othmena e(HAO) t la maternité universitaire de l´hôpital de Ben Arous (Hôpital el Yasminette). L´accord préalable des chefs de service a été obtenu au cours du déroulement de l´enquête.

Population d´étude: pour répondre à notre question de recherche nous avons mené une enquête auprès des sages-femmes exerçant leur profession dans les maternités de niveau trois de Tunis et de ben Arous pour raison de proximité.

Critères d´inclusion: les sages-femmes qui travaillent à la salle de naissance et aux services des urgences sont les seules impliquées dans notre étude. Celles qui ont acceptée de répondre au questionnaire en donnant leur consentement oral.

Critères d´exclusion: les sages-femmes qui ont refusée de répondre au questionnaire. Les sages-femmes qui sont en congé durant l´enquête. Les sages-femmes qui exercent dans des services autres que la salle de naissance et les urgences.

Lieu et période de l´enquête: l´enquête a duré 1 mois de 15 juillet 2019 à 15 aout 2019, elle a été menée dans 4 maternités universitaires de grand Tunis : le centre de maternité et de néonatalogie de Tunis, la maternité de hôpital Charles-Nicolle, maternité de l´hôpital Aziza Othmana, et la maternité de El Yasminette Ben Arous.

Outils d´évaluation: il s´agit d´une étude transversale descriptive analytique. Pour atteindre nos objectifs de recherche nous avons utilisé un questionnaire et le Maslach Burnout Inventory (MBI).

Auto-questionnaire: il s´agit d´un auto-questionnaire comportant 29 items explorant les caractéristiques : 1) sociodémographiques : Age, statut matrimonial nombre d´enfants en charge, personne à charge. 2) Professionnelles : choix de la profession de sage-femme, relation avec l´entourage professionnel, ancienneté, stress professionnel, autonomie, repos. 3) Santé et addictions. Un bref texte a précède le questionnaire pour expliquer comment répondre au questionnaire et insistant sur son caractère anonyme et volontaire a été distribué aux sages-femmes pour les sensibiliser et les inciter à répondre.

Maslach Burnout Inventory (MBI): c´est une échelle validée en langue française (version utilisée dans ce travail) [4], de 22 items : 1) 9 items évaluent l´épuisement émotionnel (EE) ; 2) 5 items évaluent la dépersonnalisation (DP) ; 3) 8 items évaluent l´accomplissement personnel (AP). Chaque item est coté de 0 (jamais ressenti) à 6 (ressenti chaque jour). Les trois dimensions évaluées, sont mesurées séparément. Cela veut dire qu´on n´obtiendra pas un score global de burn out, mais un score pour chacune des trois dimensions. Le score est soit «bas, modéré ou sévère ».

Les questions qui évaluent l´épuisement émotionnel sont : 1, 2, 3, 6, 8, 13, 14 ,16 et 20. 1) Le burn out est bas si le total est inférieur à 17. 2) Le burn out est modéré si le total est compris entre 18 et 29. 3) Le burn out est élevé si le total est supérieur à 30.

Les questions qui évaluent la dépersonnalisation sont : 5, 10, 11, 15, 22. 1) Le burn out est bas si le total est inférieur à 5. 2) Le burn out est modéré si le total est compris entre 6 et 11. 3) Le burn out est élevé si le total est supérieur à 12.

Les questions qui évaluent l´accomplissement personnel sont : 4, 7, 9, 12, 17, 18, 19, 21. 1) Le burn out est bas si le total est supérieur à 40. 2) Le burn out est modéré si le total est entre 34 et 39. 3) Le burn out est élevé si le total est inférieur à 33. Le burn out a été, par choix méthodologique, considéré sévère si les taux de l´épuisement émotionnel et de la dépersonnalisation ont été élevés et le taux de l´accomplissement personnel a été bas.

Déroulement de l´étude

Le questionnaire a été testé auprès de 10 sages-femmes pour tester sa clarté, la durée nécessaire pour le remplir certaines questions inappropriées ont été supprimés ou modifiées. 1) La collecte des données : un questionnaire auto-administré et les répondantes ont bénéficié du temps nécessaire pour remplir le formulaire de collecte des données. 2) L´analyse des données : les résultats ont été traités par logiciel Excel et SPSS dans sa version 21. Les résultats obtenus sont présentés sous forme de tableaux et de graphiques à l´aide du logiciel Microsoft Office Excel 2007. Pour l´étude analytique, nous avons utilisé le test de khi 2 pour comparer les variables quantitatives, les résultats sont considérés comme significatifs au niveau d´incertitude de 5% (p< 0,05).

Considérations éthiques

Le recueil de données durant notre enquête était basé sur le respect et le consentement préalable de toutes les participantes et des chefs de services concernés conformément au principe éthique fondamental en matière de recherche. Les objectifs et les procédures de l´étude ont été clairement expliqués aux sages-femmes recrutées afin qu´elles donnent un consentement libre et éclairé.

 

 

Résultats Up    Down

Nous avons inclus 90 sages-femmes, réparties entre les 4 maternités, comme indiqué dans le Tableau 1. La tranche d´âge (35 et 45 ans) représente 56% des cas. Nous avons trouvé que 82,2% des participantes été mariées. Parmi elles, 83,33% ont un enfant ou plus. Les sages-femmes qui n´ont pas de personne en charge représentent 78,89%. Concernant le transport au travail, presque la moitié des participantes (43%) ont besoin entre 30 minutes et 1 heure pour se rendre au travail. Une voiture personnelle présente le moyen de transport utilisé habituellement pour se rendre au travail dans 56% des cas, 38,8% utilise un bus ou un taxi et 5,6% vont à pied. Une ancienneté entre 11et 20 ans a été trouvée chez 39,9% des cas et 30,9% ont une ancienneté supérieure à 20 ans.

Le choix de métiers de sage-femme a été regretté chez 41% des sages-femmes. La majorité des sages-femmes (59%) sont satisfaite de leur travail. Quatre-vingt pour cent des participantes exercent à la salle de naissance et 20% travaillent aux services des urgences. Presque la moitié des sages-femmes (49%) considère que la charge du travail est trop lourde. Quatre-vingt-neuf pour cent des sages-femmes (soit 89%) qui ont participé à notre étude pensent que leur travail n´est pas reconnu à sa juste valeur. La plus part des sages-femmes pensent qu´elles ne disposent pas d´assez de liberté en travaillant soit un pourcentage de 69%. Sur l´ensemble de notre population, 54,4% étaient assez satisfaites des horaires du travail.

Soixante-sept pour cent des sages-femmes étaient satisfaites de la récupération entre les gardes alors que 33% ne l´étaient pas. La moitié des sages-femmes interrogées ont remarqué une baisse de leur rendement. Le taux d´absentéisme dans notre population était de 11,1%. Quatre-vingt pour cent des participantes à notre étude déclarent que leur programme de travail est définit à l´avance. Soixante-neuf pour cent des sages-femmes interrogées pensent qu'elles sont en sous affectifs ce qui leur confère une charge de travail énorme.

L´ambiance entre les sages-femmes de même service est qualifiée de très bonne dans 45% des cas. Vingt-deux pour cent des interrogées ont des très bonnes relations avec leur collègues médecins. La relation avec les collègues du service (infirmières, puéricultrices, ouvrières) est qualifiée de moyenne par 54% des participantes. Presque 38% des interrogées pensent qu´elles entretiennent une relation assez bonne avec la hiérarchie et 49% des participantes trouvent qu´elles ont une relation moyenne avec la direction de l´hôpital.

Cinquante-six pour cent des sages-femmes étaient très satisfaite de l´organisation globale du travail alors 20% ne l´étaient pas. Quatre-vingt-deux pourcents des participantes sentent un stress leur de la pratique de leur exercice quotidien. Trente-et-un pour cent des sages-femmes ont déclaré qu´elles se laissent envahir par le stress professionnel. Une maladie professionnelle a été contractée durant les dernières années dans 31,1% des cas à type d´arthrose cervical, syndrome du canal carpien, dépression nerveuse, insuffisance veineuse et douleur dorsale. Vingt-neuf pour cent des participantes à notre étude ont étaient victime d´un accident de travail. Une conduite addictive a été enregistrée dans 90% des cas aux cafés, au tabac dans 25,6%, à l´alcool dans 17,8% et aux psychotropes dans 10%.

Epuisement émotionnel: la moitié des participantes (50%) à notre étude ont eu un score élevé (>30) d´épuisement émotionnel, 33,3% ont eu un score modéré (18-29) et 16,70% ont eu un score bas <17.

Dépersonnalisation: le score élevé >12 de dépersonnalisation touche 47,8% des participantes. Le score modéré (6-11) touche 25,6% et seulement 26,7% ont un score bas <5.

Accomplissement professionnel: quatre-vingt pour cent des sages-femmes ont un score élevé (<33) d´accomplissement professionnel, 5,6% un sore modéré (34-39) et 14,4% un score bas (> 40).

Degrés du burn out: dans notre population d´étude, 51,1% des SF interrogées présentaient un burn out élevé et 35,6% d´elles avaient un burn out modéré, comme illustré Figure 1.

Il n´existe aucune relation statistiquement significative entre la présence de burn out sévère et les différentes caractéristiques sociodémographiques. Dans notre étude, le burn out sévère a été significativement lié à l´ancienneté (p=0,000), à la charge de travail (p=0,024). Dans notre étude on a pu objectiver l´existence d´une association statistiquement significative entre le variable ancienneté et burn out sévère. Le taux de burn out sévère est de 58,3% chez les sages-femmes qui ont une ancienneté >10 ans, cependant ce taux diminue chez les sages-femmes ayant une ancienneté de >20 ans soit 39,2%.

Le burn out sévère est significativement lié avec la distance lointaine entre le domicile et le lieu de travail (p=0,000) et au moyen de transport pour se rendre au travail (p=0,001). Dans notre étude, le burn out a été significativement corrélé aux : regret du choix de la profession (p=0,75), à l´insatisfaction de l´organisation globale du travail (p=0,002). On note que dans notre étude, le burn out sévère est statistiquement associé à la présence de stress professionnel (p=0,006) et à l´envahissement par ce stress (p=0,024).

Une association significative a été objectivé entre le burn out et la contraction d´une maladie professionnel (p=0,020), ainsi qu´avec l´exposition à un accident de travail (p=0,001). Un lien significatif entre le burn out sévère et la prise de café (p=0,011) et de tabac (p=0,009) a été objectivé.

 

 

Discussion Up    Down

Notre étude a été réalisée auprès de 90 sages-femmes exerçant dans des maternités de niveau trois, travaillant soit à la salle de naissance, soit aux services des urgences. Notre étude a démontré que l´épuisement émotionnel chez les sages-femmes est une situation bien réelle et alarmante. On a constaté que 86,7% des sages-femmes interrogées avaient un burn out : 1) un burn out élevé chez 51,1% des sages-femmes; 2) un burn out modère chez 35,60% des sages-femmes; 3) un burn out bas chez 13,30% des sages-femmes.

Pour les trois dimensions du burn out : 1) l´épuisement émotionnel élevé chez 50% des SF; 2) la dépersonnalisation élevée chez 47,8% des SF; 3) l´accomplissement personnel bas chez 14,40% des SF. Les facteurs associés significativement au burn out sévère sont : le célibat, l´ancienneté <20 ans, la surcharge de travail élevée, la distance lointaine entre le domicile et le lieu du travail, le regret du choix du métier, l´insatisfaction des horaires de travail et de l´organisation global de travail, le mauvais climat professionnel, la présence de stress professionnel, la contraction de maladie professionnelle, et les accidents de travail et le développement de conduites addictives.

Limite de l´étude

La nature de l´étude : transversal quantitative descriptive, qui ne peut refléter le vécu de la sage-femme qu´au moment de l´enquête. L´échelle de Maslach (MBI) qui n´est pas tout à fait adaptée à la population tunisienne, cependant il reste actuellement l´instrument de mesure de burn out le plus fiable [5]. La durée limitée de l´enquête. L´impossibilité de questionner toutes les sages-femmes : certaines étaient en congés d´autres ont carrément refusées de participer à l´étude. La subjectivité des réponses : les réponses obtenues par le questionnaire, ainsi que par l´échelle de mesure (MBI), ne pourraient pas être tout à fait objectives.

Points forts

Le choix de la population: notre population d´étude était homogène (population de sages-femmes exerçant dans des maternités niveau trois), en comparaison avec d´autres études dont la population comprend des médecins et des paramédicaux. Le taux de participation: qui est de 86,5%, c´est un taux satisfaisant en comparaison avec d´autres études nationales et internationales.

La prévalence du burn out dans notre étude est de 86,7% associant le taux de burn out sévère et modère. Dans la présente étude le niveau d´épuisement émotionnel était modéré chez 33,3% et sévère chez 50% de notre population d´étude. Dans notre étude, nous avons trouvé un niveau de dépersonnalisation faible chez 26,7%, modéré chez 25,6% et élevé chez 47,8%.

Des multiples études ont démontré que le burn out touche les professions à forte implication interpersonnelle affective [6]. Une étude australienne a trouvé un taux d´épuisement émotionnel modéré à élever dans 60% du personnel de santé des scores de burn out modérés ou élevés de plus de 30% et un niveau bas de dépersonnalisation chez 30% des participants [3].

Dans notre étude on a pu objectiver l´existence d´une association statistiquement significative entre le variable ancienneté et burn out sévère. Le taux de burn out sévère est de 58,3% chez les sages-femmes qui ont une ancienneté >10 ans, cependant ce taux diminue chez les sages-femmes ayant une ancienneté de >20 ans soit 39,2%, conformément à la littérature dont plusieurs auteurs ont montré que le stress au travail diminue avec l´augmentation des années de travail [7].

Campbell et al. ont trouvé que les sages-femmes qui ont une charge de travail lourde ou trop lourde avaient un burn out sévère. Donc la surcharge de travail est l´un des principaux facteurs de risques de burn out qui impacte négativement les ressources de l´individu au travail [8]. À travers notre étude on a constaté que 41,1% des sages-femmes répondantes ont regretté le choix de leur métier et que ceci est en corrélation avec l´installation d´un burn out sévère. L´insatisfaction de l´organisation globale du travail (75% des sages-femmes) est en association significative avec le burn out sévère (p=0,002).

Cette situation est due à plusieurs facteurs organisationnels, à l´ambiguïté des rôles, au nombre insuffisant de personnels ou la présence de personnels inefficaces et au manque de moyen. Au sujet des relations de travail, Yoshida et al. ont montré qu´un bon climat professionnel est basé essentiellement sur une bonne entente, la communication, le soutien de la part des séniors et des collègues. Mais, ces critères n´existent pas toujours, ce qui peut être à l´origine de l´apparition de relations conflictuelles, qui contribue à l´installation d´un épuisement professionnel. Dans leur étude, ils ont pu objectiver un lien significatif entre le burn out sévère et le climat professionnel [7]. Nous avons constaté que 37% des répondantes sont insatisfaites des horaires de travail. Selon les données de la littérature, l´insatisfaction au travail peut causer un mal être, une frustration et va induire à long terme une démotivation, voire même un burn out [6].

Quant au stress professionnel on a constaté qu´il existe une corrélation très significative entre l´installation de burn out sévère et la présence de stress professionnel (p=0,006) et l´envahissement par ce stress (p=0,024). Donc la présence de stress au travail est l´un des principaux facteurs de risque de l´épuisement professionnel et ce stress est le fruit de plusieurs facteurs tel que l´insatisfaction de la profession, mauvaise organisation du travail, mauvaise condition du lieu de travail, mauvais climat professionnel, surcharge de travail, mais aussi il est dû à des facteurs personnels.

A travers notre enquête on a trouvé que les sages-femmes répondantes se laissent envahir par ce stress ce qui a causé un impact négatif sur la relation entre vie professionnel et vie privé. Cela a était confirmé par l´enquête française “SESMAT” qui affirme que la présence des situations de conflits entre vie privée et vie professionnel est la première source d´émergence de l´épuisement professionnel [9].

Nous avons trouvé que 31,1% des sages-femmes ont contracté une maladie professionnelle durant ces dernières années et 29% ont été victime d´un accident de travail. Donc selon les résultats de notre enquête la variable santé au travail constitue un facteur de risque de l´installation de burn out en accords avec l´étude de Doppia où le burn out a été corrélé au mauvais état de santé [9]. Dans notre étude, 25,5% des sages-femmes interrogées étaient tabagiques, Ce résultat est en concordance avec la littérature [10]. Cependant, on n´a pas objectivé une relation significative entre burn out et consommation d´alcool ni d´autres substances (psychotrope).

Les résultats de notre étude ne sont pas toujours retrouvés dans la littérature ceci pourrait être expliqué par la taille de notre échantillon, les différences socioéconomiques entre les pays, la subjectivité des réponses et la nature transversale de l´enquête qui ne permet pas de bien déterminé les liens de causalités entre les différents facteurs.

Il serait plus adéquat d´étudier le burn out via des enquêtes longitudinales qui permettent d´étudier ce syndrome à long terme et d´établir les liens de causalités entre les différents variables. Suite à ses résultats alarmants, il serait urgent de proposer des mesures de prévention, de dépistage et de prise en charge des sages-femmes touchées par ce syndrome ou à risque. Une formation bien approfondît en matière de gestion de stress doit être intégré dans le cursus universitaire. La prévention et le traitement de l´épuisement professionnel auront certainement un impact important en termes de qualité de vie et par conséquent en termes de qualité des soins fournis.

 

 

Conclusion Up    Down

Le burn out est perçu comme étant le résultat des relations conflictuelles entre la personne et son environnement professionnel ce qui donne naissance à des influences mutuelles et continues. Les professionnels de la santé sont vulnérables à ce syndrome vu les contraintes économiques et matérielles et la forte interaction sociale. Notre étude a démontré que le SEP chez les sages-femmes est une situation bien réelle et alarmante. Nous avons constaté que 86,7% des sages-femmes interrogées avaient un burn out. Les facteurs associés significativement au burn out sévère sont entre autres la surcharge de travail élevée, le regret du choix du métier, l´insatisfaction des horaires de travail et de l´organisation global de travail, le mauvais climat professionnel, la présence de stress professionnel, la contraction de maladie professionnelle et le développement de conduites addictives. La prévention et le traitement de l´épuisement professionnel auront certainement un impact important en termes de qualité de vie et par conséquent en termes de qualité des soins fournis.

Etat des connaissances sur le sujet

  • Le burn out ou l´épuisement professionnel est un phénomène qui a été conceptualisé par Christina Maslach et ses collaborateurs pendant les années 80. Ce concept touche toutes les professions mais il touche exceptionnellement les professions à forte implication relationnel;
  • Selon les données de la littérature, l´insatisfaction au travail peut causer un mal être, une frustration et va induire à long terme une démotivation voire même un burn out.

Contribution de notre étude à la connaissance

  • Déterminer la prévalence des taux de burn out chez une population de sages-femmes exerçant dans des maternités de niveau trois du grand Tunis. Ce qui n´a pas été fait auparavant;
  • Chercher les facteurs de risques associés au burn out sévère chez cette population.

 

 

Conflits d'intérêts Up    Down

Les auteurs ne déclarent aucun conflit d´intérêts.

 

 

Contributions des auteurs Up    Down

Docteur Hassine Abouda pour l´élaboration finale de l´article. Docteur Aloui Haithem pour l´élaboration du questionnaire. Docteur Abir Karoui et Sana Menjli pour leurs conseils précieux. Professeur Mohamed Badis Channoufi pour la supervision du travail. Tous les auteurs ont lu et approuvé la version finale du manuscrit.

 

 

Tableau et figure Up    Down

Tableau 1 : répartition des sages-femmes selon le lieu d´exercice

Figure 1 : répartition des répondantes selon le degré du burn out

 

 

Références Up    Down

  1. Freudenberger HJ. The issues of staff burnout in therapeutic communities. Journal of psychoactive drugs. 1986;18(3):247-51. PubMed | Google Scholar

  2. Leiter MP, Maslach C. Nurse turnover: the mediating role of burnout. Journal of nursing management. 2009;17(3):331-9. PubMed | Google Scholar

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  4. Maslach C. Burn-out : l´épuisement professionnel. Presses du Belvédère. 2006.

  5. Maslach C. Burned-out. The Canadian journal of psychiatric nursing. 1979;20(6):5-9. PubMed

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  7. Yoshida Y, Sandall J. Occupational burnout and work factors in community and hospital midwives: a survey analysis. Midwifery. 2013;29(8):921-6. PubMed | Google Scholar

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  9. Estryn-Behar M, Fry C, Guetarni K, Aune I, Machet G, Doppia MA et al. Work week duration, work-family balance and difficulties encountered by female and male physicians: results from the French SESMAT study. Work. 2011;40 Suppl 1:S83-100. PubMed | Google Scholar

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